Il est très difficile d’expliquer son métier quand on à mis des années à s’entraîner à ce que les gestes techniques sensitifs deviennent des réflexes.
Quand je déroule une peau tannée pour la première fois, je découvre la vie de l’animal…
Sa taille et son «dessin» me définissent sa race. Une petite queue de lézard, une peau perlée presque ronde d’autruche, un buffle veiné, une chèvre serrée, une vachette, sont autant de «grains» différents.
avant la coupe, cuir d'autruche, détail
En la caressant encore entière, j’y vois les accidents de sa vie, les égratignures, les piqûres. Tous ses petits «défauts» respectables incitent à penser que l’animal a eu une vie champêtre normale. J’utilise principalement de la peau de vache, dont le stock est approvisionné par notre consommation alimentaire. L’épaisseur est variable de 1,2 à 1,8 mm ; elle peut aller jusqu’ à 5 mm, pour les «collets» de vachettes tannées végétalement.

Quand ma «base» est enfin coupée et parée, j’utilise plusieurs styles de décors, ajouré ou en relief, désireuse que chaque réalisation soit une création suscitant une histoire.
Les paysages sont coupés aux ciseaux, dans des cuirs amincis au maximum, mes couleurs vives étant souvent dans des cuirs très épais, j’en laisse souvent dans la pareuse! Je peux ainsi superposer plusieurs matières. Je m’entraîne à réaliser des paysages, un peu naïfs, du mouvement.
coupe
J’utilise des emporte-pièces à frapper- trois coups de marteau!- pour les petites découpes intérieures, cœur, fleur, étoile, goutte, le choix est assez restreint. Chaque petit morceau est pré-collé puis cousu à la machine le plus prêt de son bord, à 1 mm.
Filetage

Deux montages possibles : bord franc ou rembordé.
Dans le montage en «bords francs», chaque découpe est franche, nette, et laisse apparaître l’épaisseur. Je chauffe le «fer à fileter», chaud, je le passe à cheval sur le bord, cela enlève les aspérités du cuir. Finitions . . . Je ponce, je passe une cire teintée sur la tranche.
Dans le montage «rembordé», une épaisseur (parée au maximum) dépasse et, est retournée sur les autres, embrassant les tranches des bords et revenant sur l’autre coté. On peut aussi monter une bande à cheval sur un assemblage en bord franc.
En fait, les matériaux utilisés dépendent de la pièce à réaliser. Pour une sacoche souple, je vais chercher une peau et doublures molles.Pour une pièce d’aspect rigide si ma matière est souple, je renforce avec du thermocollant épais, du « salpa » (aggloméré de cuir), du carton, etc. . .
Malgré les centaines de modèles différents, je me rends compte que j’exécute souvent les mêmes bases, en prenant soin de ne jamais refaire les mêmes ; l’avantage des petites productions flexibles!
